Le premier ministre du Québec, François Legault, a promis mardi de durcir les mesures de laïcité dans les écoles, se disant «choqué» par les révélations concernant une école publique de Montréal où un groupe d’enseignants avait tenté d’introduire ce que le premier ministre a qualifié de convictions «islamistes».
Legault a chargé le ministre de l’Éducation Bernard Drainville et le ministre responsable de la laïcité Jean-François Roberge de trouver des solutions pour empêcher la religion de s’infiltrer dans les salles de classe à la suite d’un rapport gouvernemental sur l’école Bedford de Montréal.
«Il y a quelque chose de très inquiétant dans cette affaire. C’est cette tentative d’un groupe d’enseignants d’introduire des concepts religieux islamistes dans une école publique», a écrit Legault sur les réseaux sociaux. «Au Québec, nous avons décidé depuis longtemps de retirer la religion des écoles publiques. Nous n’accepterons jamais d’y revenir.»
Le Centre de services scolaire de Montréal — le plus grand centre de services scolaire du Québec — a déclaré samedi que 11 enseignants avaient été suspendus avec solde après qu’une enquête gouvernementale a révélé qu’un « clan dominant » à l’école de Bedford imposait un régime strict et autocratique aux élèves.
L’enquête a révélé que les enseignants, dont beaucoup étaient d’origine nord-africaine, auraient été influencés par la mosquée locale et auraient soumis les enfants à des violences physiques et psychologiques. Soit ils refusaient d’enseigner – soit ils prêtaient peu d’attention – aux programmes de sciences et d’éducation sexuelle.
Les preuves recueillies suggèrent que certains enseignants ne croient pas aux troubles d’apprentissage et aux troubles neurodéveloppementaux et refusent de laisser des spécialistes entrer en classe, estimant plutôt que la discipline – avec l’idée de « briser » l’élève – les mettrait sur la « bonne voie ».
Des témoins ont déclaré aux enquêteurs du gouvernement que les chefs religieux locaux exerçaient une « forte influence » sur plusieurs membres du personnel scolaire et un représentant de la mosquée a souligné aux responsables de l’école l’importance d’entretenir de bonnes relations avec le lieu de culte.
Le rapport mentionne qu’il y avait des membres du personnel d’origine nord-africaine qui faisaient partie de l’opposition aux méthodes du « clan dominant ».
Lors d’une conférence de presse mardi à Québec, Drainville a annoncé que les 11 enseignants — un mélange d’hommes et de femmes — ont vu leur permis d’enseigner suspendu en attendant le résultat des enquêtes disciplinaires.
«J’ai évoqué des exemples de comportements religieux – qu’il s’agisse du professeur qui commence à prier devant un élève qui s’effondre en classe, que les cours de sciences ou d’éducation sexuelle ne soient pas dispensés correctement, qu’il soit interdit aux filles de jouer au football, Il y a eu des interventions de représentants de la mosquée voisine pour demander à l’école de se comporter d’une certaine manière», a expliqué Drainville.
Drainville a déclaré que les résultats préliminaires démontrent que la loi provinciale sur la laïcité – connue sous le nom de projet de loi 21 – n’était pas respectée à l’école.
«Selon les membres de la commission, il y a un problème avec le respect de la loi sur la laïcité et nous avons donc la responsabilité d’examiner ce qui pourrait être fait pour renforcer cette loi par rapport à Bedford et éventuellement par rapport à d’autres écoles en Québec», a déclaré Drainville.
Legault a déclaré qu’il était impensable au Québec en 2024 que les enseignants évitent des matières comme les sciences et l’éducation sexuelle. «En tant que gouvernement, notre première responsabilité est de nettoyer cette école pour protéger les enfants», a-t-il écrit. «Il faut aussi penser plus largement pour éviter d’autres situations tout aussi choquantes et surtout si dévastatrices pour les enfants.»
Le projet de loi 21 a été adopté en 2019 et déclare la province comme un État laïc et comprend une disposition interdisant aux travailleurs du secteur public occupant des postes d’autorité – y compris les enseignants, les juges et les policiers – de porter des symboles religieux au travail.
Ni Drainville ni Roberge n’étaient prêts à dire mardi quelles mesures précises ils prendraient pour régler le problème.
«Parfois, il n’est pas nécessaire de modifier la loi», a déclaré Roberge. «Il faut l’appliquer, et c’est le travail du directeur, c’est le travail de l’équipe de direction du centre scolaire.»
L’enquête du gouvernement a été déclenchée par des reportages du 98,5 FM de Montréal à partir de mai 2023 sur un climat toxique à l’école. Les employés du ministère de l’Éducation ont mené plus de 102 heures d’entretiens avec 73 personnes et ont assisté à une réunion du conseil d’administration de l’école. Les témoignages dressent le portrait d’un problème qui remonte à 2016, alors que les directeurs d’école se succédaient et repartaient rapidement.
Drainville a ordonné des vérifications dans trois autres écoles montréalaises – deux écoles primaires et une école secondaire – qui auraient connu des problèmes similaires liés à l’environnement scolaire et à la gouvernance.