Les opposants se mobilisent pour une nouvelle évaluation environnementale sur la voie de contournement de Lac-Mégantic

Dans une modeste maison pleine de bibelots, sur une ferme au bord de la route 204, au sommet d’une colline, à la sortie de Lac-Mégantic, Yolande Boulanger sort une pile de feuilles de papier. Elle …

Les opposants se mobilisent pour une nouvelle évaluation environnementale sur la voie de contournement de Lac-Mégantic

Dans une modeste maison pleine de bibelots, sur une ferme au bord de la route 204, au sommet d’une colline, à la sortie de Lac-Mégantic, Yolande Boulanger sort une pile de feuilles de papier.

Elle a récolté pas moins de 250 signatures sur une pétition demandant que le Bureau de consultation en environnement du Québec (BAPE) tienne des consultations sur le projet de chemin de fer de contournement de Lac-Mégantic.

Conçu après la catastrophe de 2013 qui a fait 47 morts et rasé le centre-ville, le projet controversé mené par le gouvernement fédéral consiste à détourner la voie ferrée existante selon un large arc d’est en ouest sur une distance de 12,5 km, pour éviter qu’une catastrophe similaire ne se reproduise. encore.

Coût estimé : plus d’un milliard de dollars, financé à 60 pour cent par Ottawa et à 40 pour cent par Québec, pour être utilisé par le Chemin de fer Canadien Pacifique (CPKC).

«Toute seule, cette petite vieille, j’ai récolté 250 signatures, en allant prendre des cafés chez Tim Hortons, en allant à des réunions de l’âge d’or, des dîners où il y avait beaucoup de monde», a-t-elle raconté en entrevue à La Presse Canadienne. «C’est plutôt bien, je pense!»

Le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a déjà dit non à une demande de création d’un nouveau BAPE (Bureau d’audiences publiques sur l’environnement), soulignant que des consultations avaient déjà eu lieu et que le moment était venu d’aller de l’avant.

«Mais c’était avant la pétition, qui sera déposée prochainement à l’Assemblée nationale», a soutenu Boulanger. « Près de 2 000 signatures ont été recueillies partout au Québec. Il n’y a pas qu’à Mégantic, Frontenac et Nantes que les gens trouvent ce projet idiot.

«J’ai des proches un peu partout et ils trouvent consternant que les autorités n’aient pas plus de conscience que ça.»

Au fil du temps, la femme âgée est devenue l’une des figures de proue de la résistance au projet actuel.

Mais elle a aussi été personnellement touchée par la catastrophe. Elle a perdu son petit-fils, Frédéric Boutin, à l’âge de 19 ans, décédé par asphyxie alors qu’il tentait de s’échapper de son domicile où il dormait.

Boulanger devra peut-être exproprier 35 acres et demi de son terrain – le train passerait juste derrière sa maison – mais elle insiste sur le fait que ce n’est pas ce qui la pousse à agir, puisque des terrains ont déjà été expropriés pour le passage de la route 204 et du Route de contournement de Lac-Mégantic.

Boulanger prétend même qu’un employé de Transports Canada a tenté de l’intimider lors du processus d’expropriation, mais elle n’en démord pas. Elle mène désormais une croisade pour défendre la nappe phréatique qui alimente les municipalités environnantes de Lac-Mégantic, Frontenac et Nantes.

Le projet de contournement consiste à creuser une tranchée importante qui affectera la nappe phréatique.

« Pas moins de 33 000 chargements de granit devraient être transbordés », précise Boulanger. «Ma maison va trembler et je ne veux pas que ma crème se transforme en beurre dans le réfrigérateur.»

Lors de l’assèchement, jusqu’à 55 millions de litres d’eau devront être déversés quotidiennement dans la rivière Chaudière, selon des études fédérales.

« Nous brisons la nappe phréatique, à quel point cela sera-t-il difficile ? » elle a demandé

Les opposants soutiennent que le courant pourrait emporter les sédiments et le pétrole lourd déposés au fond de la Chaudière.

Une MRC de la Beauce a déjà exprimé des inquiétudes quant à son approvisionnement en eau.

Zones humides

De plus, une centaine d’hectares de milieux humides seraient endommagés par le passage de la nouvelle voie ferrée, mais les estimations des superficies touchées varient, ce que critiquent les maires de Nantes et de Frontenac, opposés au tracé proposé.

« Le Programme régional des milieux humides et cours d’eau de la MRC Granit répertorie 110 hectares de milieux humides qui seraient détruits, sur les 138 hectares requis pour le tracé proposé », a déclaré le maire de Frontenac, Gaby Gendron, lors d’une entrevue à son bureau, au sous-sol d’un immeuble multi-activités. bâtiment à usage spécifique.

Selon lui, la perte de ces « éponges » qui absorbent les précipitations et les inondations serait dévastatrice.

À la suite de la publication d’études environnementales en 2022, Frontenac a décidé de s’opposer au projet de contournement actuel.

Bien que sa municipalité participe à un programme de surveillance de 137 puits avec Lac-Mégantic et Nantes, le programme n’offre pas de garanties suffisantes, selon Gendron, et Frontenac elle-même a fait appel à son propre hydrogéologue.

Il réclame un nouveau BAPE, tout comme l’Union des producteurs agricoles et plusieurs autres regroupements.

Boulanger soutient que le tracé devrait plutôt relier un peu plus à l’est l’emprise d’un ancien chemin de fer de Québec Central, qui est maintenant utilisé comme sentier de VTT et n’affecterait apparemment pas la nappe phréatique.

Selon elle, plusieurs options de tracé auraient dû être étudiées de plus près.

Une « omerta »

Les opposants accusent les décideurs politiques de Québec et d’Ottawa de ne pas les écouter, tout comme leur député caquiste à l’Assemblée nationale, François Jacques, et leur représentant fédéral, le conservateur Luc Berthold.

«François Jacques ne nous écoute pas du tout, il est ‘entiche’ de la mairesse de Lac-Mégantic, Julie Morin, a déclaré Boulanger.

«Il ne s’agit rien de moins qu’un ‘oubli’ de la part des députés et des ministres de Québec et d’Ottawa», a déclaré le maire de Nantes, Daniel Gendron, en entrevue. « Nous avons écrit au ministre délégué à l’Environnement, Benoit Charrette, et il n’a même pas répondu !

Il affirme même avoir payé de sa poche un billet pour un cocktail bénéfice de la CAQ afin de rencontrer la ministre des Transports Geneviève Guilbault, en vain.

Il affirme également avoir contacté Pablo Rodriguez lorsqu’il était ministre fédéral des Transports, en vain, et que son collègue le ministre Jean-Yves Duclos l’avait également appelé pour lui faire part de ses inquiétudes, mais en vain non plus.

« Nous n’avons aucune coopération », a-t-il déploré.

Finalement, Gendron a également tenté d’entrer en contact avec le chef du CPKC, mais lorsqu’il a fait savoir qu’il voulait parler du contournement, il a été repoussé.

Boulanger mise notamment sur un revirement de Berthold, si son parti arrive au pouvoir lors des prochaines élections fédérales.

Compte tenu du coût du projet, qui pourrait atteindre 1 milliard de dollars, « M. Berthold pourrait changer d’avis, (son chef) Pierre Poilievre est un peu casse-couilles », estime-t-elle.