Les parents préfèrent une garderie abordable à une aide financière individuelle : rapport

Selon un nouveau rapport, les parents canadiens préféreraient des services de garde d’enfants agréés à prix abordable, à 10 $ par jour, plutôt que des paiements individuels qui leur seraient versés par le gouvernement. Publié …

From left to right, Maria Novikova and Alina Kractsova are two young mothers from Ukraine who have been unable to find a daycare centre with space for their children (Judy Trinh, CTV News)

Selon un nouveau rapport, les parents canadiens préféreraient des services de garde d’enfants agréés à prix abordable, à 10 $ par jour, plutôt que des paiements individuels qui leur seraient versés par le gouvernement.

Publié jeudi par l’association caritative d’autonomisation économique des femmes The Prosperity Project, le rapport reconnaît que les délais d’attente pour les garderies agréées sont encore longs, mais plaide en faveur de l’augmentation du nombre de places dans le programme au lieu de le supprimer au profit d’un modèle d’allocations familiales.

Le rapport a été rédigé par Gordon Cleveland, économiste et chercheur en petite enfance à l’Université de Toronto. M. Cleveland a mené une série de groupes de discussion avec des parents et analysé les données disponibles de Statistique Canada et les chiffres provinciaux. Pour parvenir à ses conclusions, M. Cleveland a également comparé les études existantes sur la garde d’enfants au Canada et à l’étranger et s’est penché plus en profondeur sur l’expérience du Québec, où les garderies sont subventionnées depuis 1997.

Il qualifie le programme pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants mis en place par le gouvernement libéral de « victime de son propre succès », soulignant que la possibilité de frais abordables a fait passer la demande avant l’expansion.

« Un système national de garde d’enfants est vraiment la voie à suivre, et ce n’est pas le moment de faire marche arrière. Nous en constatons les avantages, non seulement pour les femmes qui retournent au travail, mais aussi pour les enfants », a déclaré la directrice générale du Projet Prosperity, Julie Savard-Shaw, lors d’une entrevue avec CTV National News.

« Le programme a réussi à réduire les coûts pour les parents. »

Selon Mme Savard-Shaw, la décision de commander cette étude a été motivée par la publication récente de rapports de groupes de réflexion qui préconisaient un modèle d’allocations familiales. Mme Savard-Shaw s’attend à ce que les coûts associés à un programme national de garderies subventionnées soient un enjeu lors des prochaines élections fédérales.

La Loi canadienne sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, qui a reçu la sanction royale en mars, inscrit dans la loi les progrès réalisés par les libéraux sur leurs engagements fondamentaux, notamment les accords bilatéraux entre les gouvernements fédéral et provinciaux pour des services de garde à 10 $ par jour.

Les chercheurs ne savent pas exactement combien d’enfants bénéficient de services de garde à 10 $ par jour, mais les dernières données de Statistique Canada révèlent qu’environ 938 000 enfants âgés de 0 à 5 ans utilisent des services de garde agréés dont les frais ont été réduits d’au moins la moitié grâce au programme pancanadien. Citant des chiffres de 2023, l’étude révèle qu’il y a 65 000 enfants de plus inscrits dans des garderies agréées qu’en 2021.

Selon le rapport de jeudi, si le système actuel de 10 $ par jour — que huit provinces ont déjà mis en place grâce à un accord bilatéral avec le gouvernement fédéral — était abandonné au profit de paiements financiers directs aux parents, la plupart des familles seraient dans une situation pire.

Le rapport indique qu’un programme d’allocations familiales entraînerait « des inégalités d’accès dramatiques » et transformerait à nouveau la garde d’enfants en un service de marché avec des frais élevés et des salaires bas pour le personnel.

De telles allocations nécessiteraient également des paiements d’au moins 12 500 $ par enfant et par foyer, selon le rapport, qui estime également que le changement coûterait au gouvernement plus du triple de ce qu’il paie actuellement pour garantir des services de garde d’enfants abordables.

Le programme national de garderies devrait coûter au gouvernement fédéral plus de 9 milliards de dollars en paiements de transfert aux provinces et aux territoires en 2025-2026. Mais le remplacer par un programme d’allocations familiales coûterait à Ottawa plus de 28,5 milliards de dollars par an.

Le rapport note également que moins de la moitié des places de garde d’enfants nécessaires ont été créées à ce jour.

« Les plans d’action signés par les provinces et les territoires promettent une augmentation de 250 000 places en garderie agréées d’ici la fin de la période de cinq ans, mais un peu moins de 100 000 de ces places sont réservées ou construites à ce jour », écrit Cleveland dans le rapport.

Maria Novikova, une jeune mère qui a quitté l’Ukraine pour s’installer à Ottawa l’an dernier, fait partie des milliers de Canadiens qui attendent d’avoir leur enfant dans une garderie. Novikova dit qu’elle veut se concentrer sur l’amélioration de son anglais et trouver du travail pour aider sa famille, mais elle n’y parvient pas parce qu’elle ne trouve pas de garderie agréée qui puisse accueillir sa fille de deux ans, Mira.

« C’est un impact dur… Si je trouve un travail, peut-être que nous serons plus heureux, car c’est difficile d’être avec des enfants tout le temps. Et pour les enfants, c’est pareil. Ils ont besoin d’activités et d’amis », a déclaré Novikova, qui cherche une garderie depuis huit mois.

Le rapport du Projet Prospérité indique que tous les niveaux de gouvernement devraient modifier leurs stratégies pour répondre aux besoins des mères comme Novikova.

« Au départ, l’accent était mis sur la réduction des frais de scolarité. Il faut maintenant se concentrer sur la création de plus de places et l’embauche de plus d’éducateurs », a déclaré Mme Savard-Shaw.

Parmi les recommandations du rapport visant à créer des milliers de places en garderie supplémentaires au Canada, on compte notamment des appels à prolonger le congé parental pour les pères et à abaisser l’âge d’admissibilité à la maternelle de cinq à quatre ans. Seuls les enfants de l’Ontario et du Québec commencent la maternelle à quatre ans.

Le Québec, qui possède le programme de garde d’enfants le plus abordable au pays depuis le plus longtemps, a également un taux de participation des femmes au marché du travail qui est de 13 pour cent plus élevé que le reste du Canada.

« Nous avons les données. Investir dans les services de garde d’enfants génère un rendement économique élevé », a déclaré Mme Savard-Shaw.

« Quand les femmes réussissent, nous réussissons tous. »