Air Canada pourrait devoir verser plus de 100 millions $ en indemnités aux travailleurs qui ont perdu leur emploi dans les centres de maintenance il y a plus de dix ans, affirment les avocats d’un recours collectif.
Une décision rendue en 2022 par la Cour supérieure du Québec a jugé que la compagnie aérienne avait violé la loi fédérale en ne maintenant pas trois centres opérationnels lorsque Aveos Fleet Performance Inc. – l’entrepreneur qui les exploitait – s’est effondré en 2012.
Air Canada a déposé un appel, qui n’a pas encore été entendu.
Cette semaine, le juge a décidé d’une formule pour calculer les salaires perdus et autres dommages pour les 2 200 anciens employés des usines fermées d’Aveos, situées à Montréal, Winnipeg et Mississauga, en Ontario.
L’indemnisation dépassera probablement les 100 millions de dollars, soit au moins 45 400 $ par employé, a déclaré Elodie Drolet-French, avocate représentant les travailleurs.
Les ex-employés devront présenter des demandes individuelles. « Il y aura un processus clair », a déclaré Mme Drolet-French en entrevue. « Ce sera facile. »
L’indemnisation pourrait couvrir des dommages allant de la perte d’avantages à la « perte d’estime de soi », en passant par le stress et le divorce, selon un communiqué en français du cabinet d’avocats Trudel Johnston et Lesperance.
« Bien qu’il soit difficile à l’heure actuelle d’évaluer le montant total qu’Air Canada devra payer à la suite des réclamations des membres, les avocats du représentant estiment de façon prudente que ce montant dépasse largement les 100 millions de dollars », a déclaré Anne-Julie Asselinit, associée au cabinet.
Air Canada a souligné que la décision de lundi ne fait qu’établir une méthode de calcul et exige la preuve des pertes de la part des membres individuels.
«Elle reste totalement muette sur la quantification du montant total. Toute évaluation à ce stade relève donc de la pure spéculation», a déclaré le porte-parole Christophe Hennebelle dans un courriel.
Si l’appel de la compagnie aérienne contre le jugement initial réussit, la dernière décision de la juge Marie-Christine Hivon ne s’appliquera pas, a-t-il ajouté.
En cas d’échec, le coût potentiel pourrait toutefois aggraver les difficultés d’une entreprise confrontée à une baisse de la demande pour les voyages d’agrément, à une lente reprise post-pandémie pour les voyages d’affaires à marge plus élevée et à une concurrence croissante de la part de Porter Airlines en pleine expansion. Après deux ans de boom industriel, Air Canada a perdu 81 millions de dollars au premier trimestre et le cours de son action a chuté de 31 % au cours des 12 derniers mois.
Aveos a assuré l’entretien et la réparation de cellules, de moteurs et d’autres composants d’avions pendant des décennies. Fondée en 1937 sous le nom d’Air Canada Technical Services, l’entreprise a été séparée de la plus grande compagnie aérienne du pays en 2007 avant de se placer sous la protection de ses créanciers en mars 2012. Elle a licencié quelque 2 600 employés et a fermé ses portes à Montréal, où travaillait la majorité de son personnel.
En vertu de la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada, le transporteur avait l’obligation d’entretenir ses centres de Montréal, Winnipeg et Mississauga, une tâche qu’il avait confiée à Aveos. Le gouvernement fédéral a modifié la loi en juin 2016 pour assouplir cette obligation.
Le tribunal a déclaré que la sous-traitance ne libérait pas Air Canada de ses obligations légales lorsque le sous-traitant a fermé ses portes. La modification de la loi n’était pas rétroactive, a déclaré le juge, contrairement à ce que prétendait la compagnie.