Il y a une richesse qui vient de l’équilibre entre la pensée contemporaine et une profonde notion du temps. C’est palpable dans « Interweak », une exposition d’œuvres en fibre de Karen Cygnarowicz, Janet Fredericks, Bradie Hansen et Trista Ringer, visible jusqu’en octobre à la South Burlington Public Art Gallery. Les thèmes environnementaux et féministes coexistent avec des liens clairs – et, enfin, littéraux – avec une tradition artisanale.
Les tentures murales de Fredericks ont une sensibilité narrative. L’artiste de Lincoln assemble des tissus anciens et d’autres objets historiques – la liste des matériaux pour une pièce indique «champignons d’étagère séchés, feuilles de hêtre séchées, sachets de thé, étiquette de vin en papier, tissu d’ameublement, filet, tulle» – pour créer des œuvres chargées d’histoire. Sa palette dominante de bleus d’encre incorpore des chutes de tissus imprimés de cyanotypes, ainsi que certains rappelant les textiles japonais teints à l’indigo.
L’eau joue un rôle important dans les œuvres de Fredericks, notamment dans «Safari», une tenture murale de 68 x 42 pouces. Contrairement à ses pièces plus petites aux couleurs océan, celle-ci rappelle un désert : une rivière bleu pâle traverse une étendue de tulles et de mousselines sableux superposés sur des tissus à motifs. Des coutures soignées détaillent les lignes de contour sur la carte. La dimension que Fredericks crée grâce à la superposition est comme un enregistrement de ce paysage au fil du temps – non seulement où se trouve une rivière, mais aussi comment elle a bougé et érodé le monde qui l’entoure.
D’autres artistes de l’exposition poursuivent le thème aquatique. La courtepointe de Ringer « The Pond » associe un seul tissu bleu ondulé à une palette de verts. Des pièces légèrement inclinées dans chaque bloc créent l’illusion d’optique de l’eau circulant dans un labyrinthe, comme un jardin à la française dans un marais.
«The Pond» est l’une des courtepointes les plus traditionnelles de l’artiste Fletcher exposées. D’autres incorporent un texte proclamant avec audace : « Allez de l’avant et mettez le feu au monde » et « Élevé par des femmes fortes ». Ce dernier fonctionne aussi bien comme couvre-lit féministe et ici avec une signification supplémentaire : la pièce suspendue est un commentaire approprié sur ce qu’il faut pour afficher vos pensées intérieures sur un mur public.
Cygnarowicz vit à Montpellier et, selon sa déclaration d’artiste, sa pratique a été impactée par les inondations de 2023. Sa pièce sculpturale «In Between Homes: Goldenrod, Queen’s Lace, Aster, June» mesure 53 pouces sur 45 pouces, une branche d’arbre supportant d’épaisses cordes de coton, de laine et de perles de bois. Malgré son poids, l’œuvre témoigne d’une situation temporaire et marginale, les cordes se lisant à la fois comme une force et comme un poids qui doit être transporté.
«Ferry Landing» déconstruit les couleurs et les textures d’une scène fluviale. Une lourde bande de laine tissée noire et marron crée un bloc entre les cordes bleu ciel au-dessus et un ensemble chatoyant de cordes supplémentaires en bleu sarcelle, blanc et vert réfléchissant en dessous.
Les références nautiques sont encore plus prononcées dans « The River Finds Its Way Again », où les nœuds et les verticilles de Cygnarowicz s’accumulent en une sorte de filet de pêche, ses spirales gris-bleu tendues en haut et alourdies par une palette plus intense d’outremer. et des enchevêtrements indigo.
Les tissages de Hansen ressemblent également à des filets, mais plus légers et plus délicats. Dans « Evidence of Significant Repair », des boucles tricotées en fil de lin tiennent à peine ensemble, réparées avec de petits bâtons occasionnels. La douceur et la rigidité sont à l’œuvre dans les œuvres de l’artiste de Shelburne : « Rhythms » ponctue subtilement différents tissages de laine ultra fine avec un motif de petites brindilles, ce qui rend difficile de savoir si la laine retient le bois ou vice versa.
«Hema Thrinó», une tenture tricotée, associe du fil de coton rouge à des brindilles de balai de sorcière noires et brillantes, qui se regroupent devant un trou dans la surface douce. C’est une pièce extrêmement érotique pour ce décor, établissant un lien non seulement avec les femmes qui ont perpétué ces traditions artisanales, mais aussi avec celles qui les développeront à l’avenir.